Bientôt la fin des services d’écoute musicale en ligne ?

Présents depuis un peu plus de deux ans, les services d’écoute musicale en ligne, ou en streaming, ont très vite rencontré le succès et fédéré des millions d’utilisateurs. Et pour cause puisque les internautes attendaient depuis longtemps un moyen d’écouter gratuitement et légalement toute la musique de leur choix. Oui mais à en croire les derniers articles publiés à ce sujet sur le web, il semble que cela soit sur le point de changer. Et justement, nous allons essayé d’y voir un peu plus clair dans cet article.

L’écoute musicale en ligne, un engouement imprévisible ?

Imprévisible, pas vraiment. Tout le monde s’attendait bien à ce que ça marche, c’est un fait, mais personne n’aurait pu prévoir que cela marcherait autant. Et je pense que Deezer en est l’exemple le plus flagrant. Connu à l’origine sous le nom de Blogmusik (c’était d’ailleurs un de mes premiers articles), ce dernier a été le premier site français d’écoute de musique en ligne à trouver un accord légal avec les ayants-droits.

Oui, Deezer… Deezer qui à ses débuts déjà obtenait de très bons scores en terme de trafic (773.000 visiteurs en août 2007) et qui est aujourd’hui une véritable usine à gaz (7 millions de visiteurs uniques en décembre 2009). Le tout en deux ans et des poussières.

Ce qui explique sans doute pourquoi des concurrents ont très vite émergé, comme Jiwa ou encore Spotify. Précisons d’ailleurs qu’à eux trois, ces services regroupent environ 10 millions d’utilisateurs. Un chiffre impressionnant, qui explique peut-être pourquoi certaines maisons de disque commencent à se rétracter.

Warner laisse tomber Jiwa, tout le monde y voit la fin des services d’écoute musicale en streaming

C’est ainsi le cas de Warner qui, après avoir enregistré quelque chose comme 17 millions de perte, a décidé de se rétracter et de demander le retrait de son catalogue de Jiwa. Un coup dur pour le service, d’autant plus que le catalogue de cette maison de disque compte des artistes très populaires comme Madonna, Linkin Park ou encore les Red Hot Chili Peppers. Notons au passage que le choix de la Warner n’est pas anodin puisque Jiwa est aussi le service d’écoute musicale qui compte le moins d’utilisateurs (seulement 190.000 membres selon la Wikipedia).

Du point de vue de la Warner, le modèle sur lequel reposent tous les services d’écoute musicale en streaming n’est pas assez rentable. De son point de vue, le concept serait beaucoup plus intéressant si… la formule gratuite était supprimée. Ce qui n’est pas forcément faux, mais il ne faut pas oublier que ces services auraient sans doute moins d’utilisateurs s’ils ne proposaient qu’une version payante.

Pour en revenir à Jiwa, on précisera que les maisons de disque demandent en tout et pour tout 900.000 € garantis au service pour qu’il puisse diffuser leur catalogue. Manque de chance pour lui, ses revenus publicitaires n’atteignent que 300.000 €.

Cela dit, il convient de dédramatiser les choses en rappelant que Deezer lui-même avait eu des problèmes de ce genre avec  Universal à ses débuts. Le seul problème de Jiwa, finalement, c’est qu’il n’attire pas assez de monde pour que le modèle soit rentable, ce qui n’est ni le cas de Deezer, ni de Spotify. D’ailleurs, le Vide Président chez Universal a affirmé encore en janvier que “Spotify possède un modèle financier très rentable” (source : le Nouvel Obs) ce qui prouve bien que les services d’écoute musicale ne sont pas encore en danger.

Le seul danger : la loi

Cependant, même si la situation actuelle est moins alarmante qu’on le croit, le marché de l’écoute musicale en ligne n’est pas sauvé pour autant. Et le plus gros danger auquel il est exposé, c’est bien évidemment la législation de plus en plus stricte. L’exemple français est bien évidemment le plus frappant mais les autres pays européens finiront certainement par avoir aussi leur loi Hadopi.

Or, à la base, si les maisons de disque ont suivi les services d’écoute musicale en streaming, c’est essentiellement parce qu’elles souhaitaient lutter contre le piratage. Comme le dit le célèbre adage, il vaut mieux vendre peu que pas du tout.

Et même si les dispositifs comme la loi Hadopi ne serviront à rien tant ils sont limités sur le plan technique, on sait qu’ils suffiront à dissuader l’internaute lambda. Et lorsque cela arrivera, alors les maisons de disque n’auront plus besoin des services comme Deezer, Spotify ou Jiwa. Il leur suffira de sortir leur propre plate-forme (entièrement payante) et de retirer leurs catalogues de ces derniers pour voir augmenter leur chiffre d’affaire.

Bien entendu, ce n’est qu’une hypothèse, mais elle met tout-de-même un point intéressant en relief : des lois comme l’Hadopi ne sont pas dangereuses que pour les internautes, elles le sont aussi pour les entreprises, et donc pour l’emploi.

11 réflexions au sujet de “Bientôt la fin des services d’écoute musicale en ligne ?”

  1. Il est faux de dire que Spotify possède un modèle financier très rentable…Ils vivent surtout de leurs investisseurs, car les revenus publicitaires ou leur faible taux de conversion vers la version payante n’est pas suffisante pour supporter les couts… Plutot que d’écouter le vice président d’universal, je prefere lire cet excellent article (et blog) > http://digitalmusic.tumblr….

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  2. “Il leur suffira de sortir leur propre plate-forme (entièrement payante) et de retirer leurs catalogues de ces derniers pour voir augmenter leur chiffre d’affaire.”

    Comme tu le dis, s’il faut payer il y aura moins de monde!
    J’ai cru comprendre que le service payant de Deezer ne marche pas!
    On va donc retourner au piratage facilement caché de la méchante HADOPI!
    On tourne en rond…

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  3. Hop, je valide ton analyse… Mais je pense que d’ici peu on aura une offre tout integré qui va apparaitre : net-tel-tv-musique et que finalement on payera tout ça dans son abonnement sans s’en rendre compte.

    Bonne fin de week end :)

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  4. Le réel problème vient des majors qui sont trop gourmandes, j’y voit plutôt une mutation du marché. D’un coté on a ceux qui ne souhaitent pas diffuser gratuitement et de l’autre tout une scène qui cherche à monétiser sa musique… L’achat de catalogues entiers est absurde selon moi, il faudrait rémunérer l’ARTISTE en fonction des écoutes, ça changeraient pas mal de choses…

    Il faut aussi noter que les maisons de disque sont arrivées trop tard sur ce segment et il n’est pas étonnant qu’elles peinent à s’en sortir. Ce système a encore trop d’intermédiaires et c’est là tout le problème c’est bien pour ça qu’on voit de nombreux artistes quitter leur maison de disques…

    Selon moi, le réel avenir de la musique va se faire du “créateur au consommateur” ce qui va forcément entrainer une chute des coûts pour ceux qui achètent. On l’a déjà vu avec les groupes indépendant qui vendent leurs CD eux-même pour moins de 10€ à la sortie des concerts…

    Warner se plante complètement selon moi, ils devraient revoir leurs tarifs et trouver des arrangements plus sérieux avec les services de streaming, la radio hertzienne n’est ni plus ni moins que du streaming 1.0, pourquoi ce modèle ne fonctionnerait-il pas sur Internet?…

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  5. @jaguie : SFR a déjà fait un pas dans ce sens en proposant depuis pas mal de temps une offre musique via l’abonnement ADSL NeufBox.

    Mais c’est a priori limité au catalogue Universal. L’intérêt de Spotify et consorts est que l’on trouve de nombreux artistes émanant de diverses maisons de disques. Dès lors, que les majors proposent leur propre plateforme serait faire un grand pas en arrière.

    Pour moi, le salut pour les plateformes de streaming passe par une plus grande interaction entre les artistes et les utilisateurs. Le duo Spotify + Lastfm me paraît avoir pris un peu d’avance dans ce sens.

    En espérant qu’Hadopi ne nous fasse pas retourner à l’âge de pierre.

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  6. @Charly: En espérant qu’Hadopi ne nous fasse pas retourner à l’âge de pierre ? C’est justement ce qui risque d’arriver. Quoi qu’il en soit, j’avais effectivement entendu parler de l’offre de SFR mais quel est le prix de l’option ?

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  7. Sujet intéressant sur lequel j’ai failli réaliser un billet, mais je manquais d’éléments.

    Ma théorie c’est que les majors savaient très bien qu’ils allaient mettre un terme à ce genre d’écoute “gratuite” pour le consommateur (ce n’est en réalité pas le cas car il y a de la pub chez Spotify/Deezer).

    Une sorte de “on va habituer les gens à ce genre de service, au mieux ils vont s’abonner pour en profiter sur leur mobile, au pire ils vont devenir accros et supporter la pub. Une fois qu’ils seront accros on coupe les offres gratuite.” Et voilà comment on repart à la case départ.

    Personnellement avec Spotify je ne prends même plus le temps de télécharger de la musique (légalement), c’est tellement plus simple de lancer Spotify ! Pas de DRM, on écoute de la musique de façon illimité ! Avec l’abo pro tu peux écouter toute ta musique sans connexion, sans rien synchroniser car tout est automatique… dans ton mobile Spotify te suit encore (avec ou sans connexion).

    Spotify s’en sort le mieux je pense car leur solution logicielle est vraiment innovante, légère et simple. Comme les gens lançaient Winamp ou WMP ils lancent Spotify. Deezer reste lourd car en flash et en cas de plantage du navigateur (ou de fermeture accidentelle ) plus de musique. L’équipe Spotify est très ouverte et à l’écoute de ses utilisateurs, c’est là tout l’opposé de Deezer avec qui il est impossible de communiquer.

    Contrairement à Jiwa, Spotify vient d’ajouter 600 000 titres du catalogue Believe Digital (le 1er label numérique indépendant) qui contient énormément d’artistes français. D’autres surprises sont par ailleurs dans les tuyaux… :)

    Ce qui m’énerve avec les majors c’est que leurs envies deviennent réalité dans le monde entier et indépendamment des pays… tout le monde est à la même enseigne et c’est ça qui me déranger sur le fond…

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  8. J’ai du mal à adhérer à ton hypothèse à la fin de ton article, mais une chose est sûre ; ce que ces majors veulent, c’est AVANT tout éliminer la concurrence. De là à penser que les services actuellement disponibles n’existeront plus, il y a beaucoup. Tant que ces majors se feront payer des sommes aussi hallucinantes, le risque est faible, mais pas impossible.

    les maisons de disque demandent en tout et pour tout 900.000 € garantis

    Combien d’euros (%) sont réellement redonnés aux artistes ?

    L’avenir qui va nous plomber, c’est l’ACTA ; pas l’hadopi. Une fois que les majors auront bien pompé et cadré le Net, elles nous remettront des DRM en béton sur les MP3 payés au bas mot 1€50 l’unité.

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  9. @Fred : oui mais 5 euros pour accéder uniquement au catalogue Universal…

    Perso, je suis abonné à Spotify Premium, et j’en suis très content. Je trouve 90% de ce que je cherche, j’utilise le mode hors ligne sur l’Iphone, je n’achète en revanche quasiment plus de CDs du tout, donc les 10 euros par mois, même si ce n’est que de la “location” en fin de compte, je les rentabilise.

    @Mr Xhark : de quelles surprises veux-tu parler ?? Je suis tout ouïe :)

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