Depuis quelques temps, un livre anti-vaccination figure en tête de liste des résultats de recherche Covid-19 sur Amazon. Il semblerait d’autre part que des soi-disant remèdes contre la Covid-19 tels que l’ivermectine, un vermifuge pour le bétail, soient aussi promus sur le site. Accusée de promouvoir des mensonges sur la pandémie et les vaccins, Amazon se retrouve actuellement sous la pression des démocrates du Congrès des Etats-Unis.
Au cours de la semaine du 6 septembre dernier, des lettres de demande d’informations sur les politiques de gestion de la désinformation d’Amazon ont été envoyées au PDG de l’entreprise, Andy Jassy, par Adam Schiff, représentant de la Californie, et la sénatrice Elisabeth Warren, du Massachusetts. Les lettres s’enquièrent également des actions prises par l’entreprise pour empêcher la recommandation par son système de livres et autres produits mensongers sur les vaccins et la pandémie.
Schiff a déclaré qu’Amazon profitait directement du sensationnalisme de la désinformation antivax alors que les théories du complot continuent de contribuer directement aux décès liés à la Covid-19. De son côté, Warren a qualifié l’entreprise d’incapable ou simplement, non disposée à modifier ses pratiques commerciales pour éviter la propagation des mensonges et des produits inappropriés sur le site.
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Désinformation et théories du complot sur Amazon
Durant la pandémie, les plateformes de médias sociaux telles que Facebook, YouTube et Twitter ont été soumises à un examen minutieux sur leur manière de traiter la désinformation sur la santé. A l’époque, Amazon a pu échapper à l’examen, mais une série d’enquêtes menée ces derniers mois par des journalistes et des universitaires a révélé de nouvelles informations sur ses algorithmes.
Les enquêtes ont montré que les algorithmes d’Amazon faisaient la promotion de livres contenant des informations mensongères contre la vaccination ainsi que des théories du complot concernant la Covid-19. D’autre part, il s’avère que les gens faisaient la promotion de faux médicaments dans les critiques, en contournant facilement les règles. Parmi ces faux remèdes, il y a l’exemple de l’ivermectine, un médicament antiparasitaire utilisé chez les animaux et que la Food and Drug Administration des Etats-Unis a déjà déconseillé.
Selon Warren, les recherches sur Amazon pour des termes comme « Covid-19 » et « vaccin » ont conduit en premier lieu à un livre de Joseph Mercola, un médecin de Floride connu pour ses affirmations, pourtant déjà démystifiées, sur les vaccins. D’autres termes tels que « Covid-19 » ou encore « vaccin Covid-19 » ont mené à des livres qui vantaient l’efficacité de l’ivermectine et qui affirmaient que les vaccins rendaient les gens malades et les tuaient.
Sur Amazon, le livre de Mercola a été qualifié de « best seller » et est apparu comme premier résultat pour le terme « Covid-19 » le jeudi 9 septembre dernier. Pour le mot « vaccin », il se trouvait à la troisième place.
Pour Renée DiResta, qui étudie la désinformation au Stanford Internet Observatory, étant donné qu’Amazon permet aux auteurs de classer leurs propres livres, il est possible que le système soit détourné par de mauvais acteurs. Par exemple, si une personne écrit un livre sur le cancer et qu’il affirme que du jus peut guérir le cancer, il peut le classer parmi les livres sur le cancer. De ce fait, le livre peut se retrouver à la première place dans la section oncologie d’Amazon.
D’un autre côté, le système de recommandation d’Amazon conseille automatiquement aux acheteurs des produits que d’autres personnes ont déjà achetés.
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Amazon, une plateforme de liberté d’expression ?
Ce que souhaitent Schiff et Warren c’est qu’Amazon s’explique sur les limites de la désinformation et des théories du complot et sur la manière dont l’entreprise applique ces règles. Ils s’inquiètent également du fait que les politiques concernant la désinformation sur les vaccins ne soient pas précisées dans les directives de contenu de l’entreprise.
En réponse à une demande d’explication sur les revendications anti-vaccination qu’a faite Schiff en 2019, Amazon a simplement répondu « qu’elle fournissait à sa clientèle l’accès à une variété de points de vue ».
Tina Pelkey, porte-parole d’Amazon, a expliqué dans une déclaration que les livres listés sont constamment évalués pour s’assurer qu’ils soient bien conformes à leurs directives en matière de contenu. Selon ses dires, un service supplémentaire, se trouvant en haut des pages des résultats de recherche pertinents, permet aux clients d’aller vers un lien où ils pourront trouver les conseils du CDC sur la Covid-19 et les mesures de protection.
Pour Imran Ahmed, directeur général du Center for Countering Digital Hate, qui suit la désinformation en ligne à propos de la Covid-19, les plateformes technologiques cachent souvent leurs activités en disant qu’elles sont des plateformes de liberté d’expression, alors que leurs algorithmes, leurs règles et leur économie disent le contraire.