La terrible histoire de Sylt, le seul camp de concentration nazi construit au Royaume-Uni

Beaucoup ignore la véritable histoire de l’île d’Aurigny et pourtant elle mérite d’être racontée. Cette île, qui fait partie des îles Anglo-Normandes, a été le témoin des tortures infligées par les nazis durant la Seconde Guerre Mondiale sur le territoire britannique.

Dans les années 1940, peu de temps après la capitulation du régime de Vichy, les Allemands se sont emparés d’Aurigny. En plus d’y avoir construit des camps de travaux forcés, ces derniers y ont établi deux camps de concentration dirigés par les Schutzstaffel (SS) nazis qui ont été les théâtres de crimes atroces.

crédits Pixabay

L’un de ces camps, baptisé Sylt ou Lager Sylt, renferme les secrets macabres de l’occupation nazie sur le sol britannique.

Le Lager Sylt : le camp de l’horreur

Au départ, le Lager Sylt faisait partie des nombreux camps de travaux forcés construits par les nazis pour assurer les fortifications d’Aurigny. En mars 1943, après être tombé entre les mains des SS, celui-ci a été transformé en camp de concentration pour abriter des prisonniers d’origines ukrainiennes, polonaises ou encore russes.

Sous le contrôle de « l’unité du chef de la mort » des paramilitaires SS, le Lager Sylt s’est rapidement transformé en camp de l’horreur comme l’attestent les témoignages des détenus et les résultats d’une enquête officielle menée après la guerre par le gouvernement britannique.

Une histoire que le gouvernement britannique souhaite étouffer ?

Après la Seconde Guerre Mondiale, Aurigny a été restituée aux Britanniques. L’armée a mené une enquête pour découvrir ce qui s’était passé dans le Lager Sylt. Les documents officiels du SS nazi ont révélé que 103 personnes y avaient péri.

Des sources affirment pourtant que le nombre des victimes s’élève en fait à 700. A un certain moment, le gouvernement britannique a même été soupçonné de vouloir cacher ce qui s’est réellement passé à Aurigny pour faire tomber l’histoire des camps de concentration nazis dans l’oubli.

Des camps de concentration peu connus du public

Caroline Sturdy Colls, archéologue spécialisée dans les sites de l’Holocauste à l’Université de Staffordshire au Royaume-Uni, a décidé de percer les secrets d’Aurigny. La scientifique a admis qu’elle ignorait tous des crimes qui ont eu lieu sur cette île.

« En tant que citoyenne britannique et chercheuse, je n’avais jamais entendu parler des atrocités perpétrées à Aurigny pendant la Seconde Guerre mondiale avant de faire mon doctorat. J’avais vaguement conscience du fait que les Allemands occupaient les îles Anglo-Normandes, mais pas vraiment qu’ils y avaient construit des camps. »

Caroline Sturdy Colls a rouvert le dossier d’Aurigny

Avec l’aide d’une équipe d’archéologues de l’Université du Staffordshire, Caroline Sturdy Colls a rouvert le dossier d’Aurigny. Étant donné qu’il ne reste plus grand-chose de Sylt, ces derniers ont dû faire appel à des méthodes modernes pour étudier le site.

En plus d’avoir passé en revue tous les documents d’archives et les récits historiques concernant le Lager Sylt, les scientifiques ont utilisé des photos de reconnaissance aérienne déclassifiées ainsi que de nouvelles techniques de relevés non invasifs, dont le LiDAR, pour obtenir une carte de Sylt durant l’occupation des nazis.

Des prisonniers séquestrés dans des conditions inhumaines

Les recherches menées par Caroline Sturdy Colls et son équipe ont notamment révélé que le Lager Sylt avait fait l’objet d’une expansion sous le contrôle des SS. Les prisonniers y auraient vécu dans des conditions inhumaines.

Ils auraient été entassés dans des baraquements qui n’offraient qu’environ 1,4m² d’espace pour chaque personne. Les chercheurs ont rapporté les propos de Wilhelm Wernegau, un ancien prisonnier de Lager Sylt.

« Dans ma baraque, il y avait environ cent cinquante hommes ou peut-être un peu plus. Il y en avait à peu près autant dans chaque cabane… Nous avions des couvertures de paille et pendant tout ce temps à Aurigny, nous avons terriblement souffert des poux. »

Ces conditions de vie spartiate auraient propagé une épidémie de typhus parmi les prisonniers.

Le groupe de scientifiques a également découvert les toilettes des détenus en retirant la végétation du site. A l’instar des baraquements, celles-ci étaient aussi « sous-dimensionnées et rudimentaires. »

Un lieu de mémoire

Bien que les autorités locales soient encore assez réticentes pour aborder l’histoire des camps de concentration d’Aurigny, Caroline Sturdy Colls et son équipe ont réussi à mettre en lumière ce qui s’est réellement passé sur cette île. « Le travail que nous avons fait avait pour but de faire connaître plus largement les histoires des personnes qui y ont souffert. »

Graham McKinley, élu d’Aurigny, a fait savoir qu’il voulait ouvrir le site de Lager Sylt au public et en faire un lieu de mémoire pour montrer au monde ce qui s’est réellement passé dans ce camp de concentration.

L’étude réalisée par Caroline Sturdy Colls et son équipe a été publiée dans la revue Antiquity et reprise par le National Geographic.

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