Bien plus qu’une expression aux allures de même popularisée par les réseaux sociaux, le fact checking est une méthode qui a fait ses preuves. Derrière ce terme se cache une méthodologie de vérification qui a considérablement évolué au cours de ces dernières années.
Cette évolution a été fortement nourrie par l’avènement d’Internet et la prolifération de fake news qui a inévitablement suivi. Alors que le détournement et la déformation sont devenus plus que jamais des menaces à la diffusion fidèle de l’information, le fact checking s’impose comme solution.
En quoi consiste le fact checking ? Comment fonctionne cette méthode ? Découvrez ici tout ce qu’il y a à savoir au sujet du fact checking et de tout ce qui se passe dans ses coulisses.
Le fact checking: qu’est-ce que c’est ?
Le rôle des professionnels du fact checking consiste essentiellement à vérifier les contenus publiés pour s’assurer de leur véracité. Néanmoins, cette méthode est beaucoup plus complexe qu’il peut paraitre.
Le fact checking (vérification des faits en anglais) est un procédé journalistique. Son objectif principal est de s’assurer de la véracité le contenu d’un article, d’un discours ou d’une publication. Malgré les apparences, cette notion est loin d’être récente.
En effet, le magazine Time travaillait déjà avec des vérificateurs de faits en 1923 dès son lancement. Leur mission consistait à étudier minutieusement chaque magazine avant sa publication à la recherche d’incohérences qui auraient pu s’y glisser.
L’origine du fact checking est donc vraisemblablement anglo-saxonne, ce qui explique d’ailleurs l’emprunt du terme à l’anglais. Il faudra attendre plusieurs décennies pour que cette méthode de vérification soit introduite auprès des médias en France.
Cela ne signifie pas pour autant que le contenu de la presse écrite ou les documents importants ne faisait pas l’objet d’une analyse. La différence est qu’elle n’était pas aussi professionnelle que celle effectuée de l’autre côté de l’océan par les Américains.
Plus tard, entre la fin de la Première Guerre mondiale et le début de la deuxième, les écoles de journalisme naissent en France et le métier se professionnalise.
Bien que le niveau d’exigence vis-à-vis de la presse écrite ait augmenté, le fact checking tel qu’il est pratiqué en France à ses débuts n’est pas une copie conforme du modèle américain. Ce n’est qu’à partir des années 2000 que les journalistes français choisiront de se calquer sur les modèles typiquement américains.
Avec toutes ses pratiques et ses outils, la vérification des faits s’impose désormais comme étape indispensable au travail journalistique. Cette importance se traduit par la mise en place de structures spécialisées qui y sont entièrement dédiées.
L’évolution du fact checking
Au fil des années, la pratique du fact checking a évolué, aussi bien en Amérique que dans le reste du monde. L’adoption rapide d’Internet et la multiplication des réseaux sociaux ont notamment entrainé une extension du champ d’action de cette méthode.
Il est de notoriété publique que l’expansion du World Wide Web n’a pas été que bénéfique. Cela se justifie spécifiquement dans le domaine de l’information où elle a fait (et continue de faire) des ravages notables. Fake news, hoax, intox, désinformation, etc., qui se répandent comme une trainée de poudre en sont quelques exemples palpables.
Les spécialistes du fact checking s’orientent donc vers d’autres types de contenu et adoptent des méthodes plus modernes dans leur analyse. Aujourd’hui, le fact checking ne se limite plus qu’à du contenu écrit. Il s’applique également à d’autres types de supports informatifs tels que la télévision et la radio.
Certains journalistes sont notamment missionnés pour vérifier les propos d’invités sur des plateaux de télévision, surtout au cours de débats politiques. De plus en plus de journalistes se sont également orientés vers le fact checking, en se spécialisant sur un type de contenu précis.
Une automatisation du fact checking a également vu le jour, avec le développement d’une multitude de logiciels. Ceux-ci peuvent analyser un contenu et le comparer avec une base de données pour établir sa valeur de vérité.
Le Huffington Post a par exemple rendu disponible l’application Truth Teller en 2013. Elle permet de vérifier en temps réel les paroles énoncées par une personne et d’établir si son discours est vrai.
Quelles sont les différentes étapes du fact checking ?
Afin de remplir sa mission au mieux, le spécialiste du fact checking (ou fact checker) organise son travail par étapes. Dans l’évaluation de la véracité des informations, la rigueur est de mise, et elle se résume en ces quelques tâches-clés.
La collecte des informations à vérifier
La première étape du fact checking est la collecte des informations. Le travail du fact checker ne se limite pas à la vérification d’articles de presse. Il peut se faire également sur des documents, des essais, etc.
Généralement, le spécialiste se voit attribuer du contenu à passer au crible par la structure qui l’emploie. Dans certains cas, les écrivains n’hésitent pas à envoyer des copies de leurs travaux pour du fact checking avant publication.
Le professionnel doit lire l’ensemble des documents ou des articles à étudier ainsi récoltés. Ensuite, il passe au recensement de toutes les affirmations ou statistiques susceptibles d’être remises en cause.
La vérification des faits de base
Le fact checking en lui-même est un processus qui peut se révéler long et fastidieux. Il implique la recherche de toutes les sources qui ont été utilisées comme base à la rédaction du contenu. Cela inclut généralement :
- des articles publiés sur Internet ;
- des articles de journaux ;
- des études scientifiques, etc.
Pour y arriver, le vérificateur doit passer par une analyse minutieuse de détails tels que les personnes citées, les chiffres mentionnés, les dates et les lieux.
Le travail du fact checker est ici de prouver la fiabilité, la crédibilité, l’impartialité, mais aussi l’indépendance de chacune de ces sources. Toutefois, il n’est pas toujours évident pour lui d’arriver à ses fins. Il est souvent nécessaire de se pencher sur l’historique des sources elles-mêmes pour évaluer leur objectivité au préalable.
Il peut arriver que le vérificateur de faits se tourne vers des experts d’autres domaines pour les informations techniques.
Malgré le fait qu’il dispose d’une multitude d’outils relativement sophistiqués, le spécialiste est aussi confronté à des difficultés. Les deep fake qui deviennent de moins en moins identifiables en font partie et sont difficilement surmontables.
La rédaction du rapport et la publication des travaux
L’une des caractéristiques essentielles du fact checker est son impartialité. Son unique objectif est de faire en sorte que l’information destinée à la masse soit crédible et réelle. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles les premières entités de fact checking en France étaient indépendantes.
Une fois les travaux de vérification terminés, le spécialiste rédige un rapport dans lequel il fait état des observations faites au cours de son analyse. Ensuite, il publie le résultat de son travail afin d’informer le public de la qualité de l’article ou du document examiné.
Le rapport se doit d’être bien évidemment transparent et de documenter avec soins les différentes étapes du processus. Les résultats doivent aussi être présentés de la manière la plus neutre possible pour laisser les lecteurs se faire leur opinion.
Le fact checker peut éventuellement reconnaitre ses biais potentiels qui auraient pu influencer de quelque façon l’étude.
Comme dans le journalisme en général, il est nécessaire que le checker effectue une veille pour apporter des mises à jour à son rapport.
En quoi le fact checking est-il important ?
Dans un contexte où le discours politique et les médias sont vivement critiqués à cause de leur absence de crédibilité, le fact checking a un rôle important à jouer.
La vérification des faits en amont est nécessaire avant la diffusion d’informations. Avec l’avènement d’Internet et des réseaux sociaux, n’importe qui peut relayer l’information. Cependant, il suffit que celle-ci soit erronée pour qu’elle fasse des dégâts parfois irréparables.
Les analyses des fact checker permettent de faire ressortir la vérité tout en luttant contre la désinformation. De cette manière, elles contribuent ainsi à une compréhension plus précise et équilibrée des événements.
Le fact-checking renforce la crédibilité des médias en démontrant leur engagement envers des normes élevées de journalisme professionnel. Dans le même temps, il encourage la pensée critique et responsable chez les consommateurs d’information.
D’autre part, le fact-checking a un lien étroit avec la politique. Il permet notamment de maintenir une discussion publique basée sur des faits en fournissant des informations précises au public. La transparence est donc encouragée de la part des entités privées et publiques.
Le fact checking: une méthode qui a ses limites
Le fact checking s’est aujourd’hui démocratisé au point d’être enseigné dans les universités et les écoles de journalisme. Cependant, un paradoxe entoure cette méthode. Son efficacité est en effet contestée dans certains contextes.
Par exemple, le fact checking n’est pas toujours efficace lorsqu’il s’agit de mettre en évidence des propos mensongers tenus par des personnalités publiques. De plus, certaines personnes rejettent la prétention du fact checking à mettre en lumière la vérité.
Il faut également rappeler que le fact checking n’est en rien une garantie. Certaines personnes (avec de l’influence) peuvent décider d’ignorer un rapport d’enquête et s’en tenir à leur vérité. Dans le cadre de la politique par exemple, il est difficile, même avec du fact checking de modifier l’attitude de partisans avec de fortes convictions.
De leur côté, les vérificateurs de faits eux-mêmes peuvent parfois constituer une limite. De fait, ils restent des humains dont les décisions peuvent être irrémédiablement influencées par des opinions et biais personnels.
Par manque de temps, il peut également arriver que le fact checking ne soit pas optimal et laisse passer quelques irrégularités entre ses mailles. La complexité de certains sujets et le nombre limité de sources y participent aussi.
Vous l’aurez compris, le fact-checking est une arme journalistique dans la bataille contre la désinformation et la propagation de fake news. N’hésitez donc pas à vous y référer pour avoir un meilleur contrôle sur les informations que vous consommez.