
Quand une vidéo deepfake est utilisée pour dénoncer les abus de droit d’auteur
Depuis quelque temps, le deepfake est devenu une nouvelle « tendance » que certaines personnes se donnent à cœur joie d’utiliser dans le but de faire de simples blagues, ou pire, pour ternir la réputation de personnalités connues. Il y a aussi ceux qui ont décidé de l’utiliser pour des causes plus nobles ou plus justes.
C’est notamment le cas de Bill Porter qui a décidé de faire une vidéo deepfake… pour dénoncer les abus de droit d’auteur !

Pour rappel, Porter avait déjà fait le buzz il y a quelques semaines, en partageant une vidéo truquée de Mark Zuckerberg ou ce dernier se vantait qu’il avait le pouvoir de contrôler le monde.
Cette fois-ci Bill Porter a « détourné » une vidéo de Kim Kardashian pour lui faire parler du pouvoir que les entreprises et plateformes sociales exercent sur leurs millions d’utilisateurs.
Les véritables auteurs de la vidéo protestent
Pour créer son clip deepfake, Bill Porter a utilisé une toute partie d’une vidéo de la société de médias Condé Nast. Intitulée « 73 Questions With Kim Kardashian West », cette dernière avait été partagée par Vogue au mois d’avril dernier. Les véritables propriétaires de la vidéo n’ont pas du tout apprécié que leur œuvre soit détournée. Ils ont ainsi pris la décision de faire bloquer la version deepfake sur YouTube.
Dans un entretien avec le site Motherboard, Porter raconte avoir reçu un e-mail de YouTube qui l’a informé que Condé Nast a demandé a ce que la fameuse vidéo soit bloquée. C’était le 12 juin dernier.
Porter avoue avoir été très surpris par l’initiative de Condé Nast, ainsi que par la décision de YouTube : « Nous aurions pensé que nos œuvres étaient protégées par la loi britannique sur le droit d’auteur, mais la vidéo a été bloquée dans tous les territoires », a-t-il déclaré.
Deepfake et réseaux sociaux : le débat fait rage
Cette histoire entre Bill Porter et Condé Nast donne lieu à un débat houleux sur le droit d’auteur et la manière dont certains auteurs abusent justement de leur droit. Dans le cas de la vidéo deepfake de Kim Kardashian, Joe Mullin, analyste des politiques pour Electronic Frontier Foundation, estime qu’elle ne représentait pas de risque pour la vidéo originale.
Il explique en effet dans un entretien avec le site Motherboard que comme la version deepfake n’a utilisé qu’une « petite partie de l’original et la transforme de manière substantielle », « elle ne remplace pas la vidéo originale et il est difficile d’imaginer que cela nuirait à la valeur marchande de l’original ». « Malheureusement, les détenteurs de droits d’auteur n’envisagent pas toujours les cas d’utilisation loyale avant d’envoyer des envois DMCA censurant le discours […] », a-t-il ensuite déploré.
Certains ne partagent évidemment pas ce point de vue. Suzie Dunn, de la faculté de droit de l’Université d’Ottawa, a déclaré sur le sujet : « Vous ne pouvez pas simplement appeler ça de l’art ou appeler ça de la parodie pour le transformer. Il doit avoir une sorte d’expression nouvelle et significative. »
Pour ceux qui veulent en juger par eux-mêmes, la vidéo deepfake de Kim Kardashian est toujours disponible sur Facebook et Instagram.