Retour sur l’histoire de l’Armée de Terre Cuite

En 1974, des agriculteurs qui habitaient à l’est de Xi’an, la capitale de la province du Shaanxi, en Chine, ont découvert une armée qui se tenait prête à combattre depuis l’Antiquité. Elle rassemble plus de 8000 hommes et 670 chevaux. Faits en argile cuite, les membres de ces troupes avaient pour mission de protéger Qin Shi Huang, le premier empereur de Chine, dans l’au-delà.

Suite à la trouvaille, les autorités locales ont envoyé des archéologues chinois sur place. Les fouilles ont permis de mettre à jour une nécropole de près 100 km². Les statues en terre cuite étaient disposées dans trois fosses principales. Il y a une quatrième fosse qui est vide, probablement parce que la mort subite de l’empereur a interrompu les travaux.

L'Armée de Terre cuite
Crédits Pixabay

Ce véritable chef-d’œuvre funéraire date de la fin du troisième siècle av. J.-C. Sa construction a commencé lorsque Qin Shi Huang n’avait que 13 ans.

Un tumulus de la taille d’un terrain de foot

La nécropole n’est autre qu’une reproduction en version réduite du palais impérial. Outre les trois fosses abritant les statues, l’espace inclut également plusieurs bureaux, des salles, des écuries et d’autres structures. Un parc impérial a même été construit autour de la tombe de l’empereur.

Le tumulus impérial a été érigé au pied du mont Li, à environ 1,5 km à l’ouest des quatre fosses. Il s’agit d’un tumulus en terre ayant la forme d’une pyramide. Cet espace hermétique, entouré de deux murs particulièrement épais, n’a jamais été fouillé. Les autorités locales craignent que, une fois que le tumulus est ouvert, les artefacts qui s’y trouvent s’altèrent. En effet, exposée à l’air sec, la peinture à base de laque risque de s’écailler en quatre minutes.

Chaque statue est unique

Chaque statut a des particularités qui la rendent unique. Chacune des figurines a un visage singulier. Selon certains récits, chacune d’elles était le portrait d’une personne réelle. Néanmoins, les études scientifiques ont permis de constater que les artistes se sont basés sur 10 visages types et y ont ensuite apporté des variantes. Ainsi, les concepteurs ont utilisé des moules.

Toutefois, ils ont appliqué des milliers de combinaisons pour rendre l’œuvre encore plus réaliste.

Les figurines ont été construites à l’échelle 1/1. La taille, l’uniforme, et la coupe de cheveux des statues varient selon leur grade. Néanmoins, les archéologues ont repéré certaines variations qui ne semblent pas être liées au rang, comme la présence de protège-tibia ou la forme du pantalon, etc.

Les recherches ont également révélé que les statues étaient initialement peintes en couleurs vives : rose, rouge, vert, bleu, noir, brun, blanc et lilas. Une couche de laque été enduise sur la terre cuite pour protéger la peinture. Toutefois, juste après avoir été exposées au grand jour, les figurines ont pâli.

Dans une position défensive

Les experts pensent que l’armée d’argile était destinée à protéger le site durant 10.000 ans. Chacune des quatre fosses a une profondeur d’environ 7 m. Selon les experts, l’emplacement des fosses par rapport au tumulus est significatif. En effet, les royaumes vaincus par l’État Qin se trouvaient à l’est.

La fosse n°1, longue de 230 m et large de 62 m, est la plus grande des quatre. Elle se divise en 11 couloirs d’environ 3 m de large. Dans chaque corridor se tiennent quatre fantassins de front. Au total, l’endroit regroupe 6 000 figurines.

La fosse n°2 abrite des figurines d’artillerie et d’infanterie. Elle contient également des chevaux et des chars de guerre.

La fosse n°3 rassemble les officiers de haut rang de l’armée immortelle de Qin Shi Huang. C’est, en quelque sorte, le « quartier général ». Les archéologues y ont également trouvé un char.

Les chercheurs ont fouillé d’autres fosses annexes situées au sein et en dehors des murs qui entourent le tombeau du premier empereur de Chine. Celles-ci contiennent des chariots en bronze, des armures en pierre, ainsi que des sépultures de chevaux, d’animaux rares ou de travailleurs. Les archéologues y ont aussi trouvé d’autres statues représentant des acrobates, des musiciens et des fonctionnaires. Exceptionnellement, les civils ont été sculptés à la main.

La nécropole n’était pas à l’abri des pillards

Au total, les experts ont enregistré 8 000 soldats, 130 chars et 670 chevaux. Seulement 150 chevaux sont montés. En outre, ils ont retrouvé des épées, des pointes de lance, des pointes de hallebarde et des pointes de flèche. Au total, ils ont recueilli 40 000 armes en bronze. Ils pensent qu’il y en avait plus, mais que les autres ont été pillés.

En effet, les pillards ont laissé des indices. Des statues des fosses n°1 et n°2 comportent des marques d’incendie. De plus, les chercheurs pensent que les corridors étaient initialement couverts par des hangars en bois. Ils ont trouvé des restes de toits brûlés près des figurines.

Par ailleurs, les aléas naturels et le temps ont impacté sur l’état de conservation du mausolée. Au moment de la découverte, le site était couvert par le dépôt d’un sol sablonneux et rougeâtre d’environ 5 m de haut. Certaines statues étaient cassées. Les experts les ont reconstituées à partir des fragments tombés.

Trente-six ans de travaux

Le choix de la terre cuite comme matériau de construction est largement justifié. Tout d’abord, cette matière est abondante dans la localité. En plus d’être accessible, il s’agit également d’un matériau malléable, ce qui facilite la production en série. Une fois cuite, l’argile devient résistante et durable.

La construction du site aurait nécessité une mobilisation de masse. Selon les scientifiques, la ville a dû accueillir environ 30 000 familles. À peu près 700 000 personnes auraient été impliquées dans les travaux. Outre la main d’œuvre, le projet antique aurait été mené par des spécialistes de la terre cuite, des menuisiers, et des orfèvres. Les travaux ont duré 36 ans.

Les bâtisseurs de la tombe ont été sacrifiés

Connu comme le père de la Grande Muraille de Chine, Qin Shi Huang a également unifié le pays en vainquant les autres royaumes belliqueux.

Le choix de la terre cuite a une autre raison valable : sacrifier de vrais soldats n’aurait pas été très subtil, surtout lorsque la décision appartient à un roi conquérant. Néanmoins, celui qui devint le premier empereur n’a pas hésité à sacrifier les bâtisseurs de son tombeau.

Au-delà de ses prouesses monumentales, Qin Shi Huang reste un mégalomane autoritaire et cruel dans la mémoire collective. Juste après avoir terminé leur mission, les travailleurs, qui venaient de différentes localités, ont été assassinés et enterrés en masse. Les sacrifices incluaient également de vrais animaux, notamment des chevaux.

Des expositions à travers le monde

Ce complexe monumental reflète à la fois la prétendue grandeur du premier empereur et les ressources dont il disposait. Ce qui est encore plus fascinant, c’est qu’une grande partie de l’immense complexe n’a pas encore été explorée. Le fait est que des infrastructures ont été construites au-dessus de ces étendues.

Le site est devenu l’une des attractions touristiques les plus visitées au monde. Des expositions des guerriers en terre cuite ont eu lieu dans plusieurs villes du monde, comme Londres, Barcelone, Atlanta, San Francisco, et bien d’autres encore. En effet, les autorités chinoises ont autorisé le prêt de quelques statues.

Certains écrivains et journalistes ont remis en doute l’authenticité de ces infrastructures antiques. Toutefois, d’après l’archéologue français Jean-Paul Demoule, ancien président de l’Institut national de recherches archéologiques préventives, « l’armée d’argile du premier empereur de Chine fait partie de ces vraies trouvailles archéologiques spectaculaires [qui] ont été présentées au moment de leur découverte comme des faux, tant elles paraissaient improbables. »

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